
Un tweet publié le 1er juin 2025 par Clément Muya affirme que « la RDC est désormais un protectorat des États-Unis au même titre que les Émirats arabes unis, Porto Rico, la Corée du Sud ou le Japon ». Cette déclaration a suscité des réactions sur les réseaux sociaux, mais elle repose sur une interprétation erronée des faits et une confusion grave des concepts géopolitiques et juridiques.
Dans cet article, nous démontrons pourquoi cette affirmation est fausse, en mobilisant des éléments :
- de droit international,
- de l’histoire politique des protectorats,
- de la situation actuelle des relations USA–RDC.
1. Qu’est-ce qu’un protectorat ? Une définition juridique
Un protectorat est une relation diplomatique dans laquelle un État souverain cède partiellement sa souveraineté à une puissance étrangère, généralement en matière :
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- de défense,
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- de politique étrangère,
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- ou d’administration.
Le protectorat implique une perte formelle ou de facto de souveraineté. Il peut être juridiquement reconnu, comme ce fut le cas dans le temps :
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- du Maroc sous protectorat français (1912–1956),
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- de la Tunisie,
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- ou de certains États africains sous domination britannique ou allemande.
Or, la République Démocratique du Congo est un État pleinement souverain, reconnu comme tel par l’ONU, l’Union Africaine et les instances internationales. Aucune déclaration officielle, traité ou résolution n’a établi un tel statut de protectorat entre la RDC et les États-Unis.
2. Comparaisons trompeuses : Porto Rico, Japon, Corée du Sud
Le tweet compare la situation de la RDC à celle de :
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- Porto Rico : territoire non incorporé des États-Unis (sous souveraineté américaine mais sans pleine représentation politique),
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- Japon et Corée du Sud : États souverains, alliés militaires des USA avec des bases américaines sur leur sol.
Ces comparaisons sont juridiquement infondées :
Pays | Statut juridique | Souveraineté |
---|---|---|
Porto Rico | Territoire sous juridiction directe des USA | Non souverain |
Japon | État souverain, traité de sécurité avec les USA | Totalement souverain |
Corée du Sud | État souverain, alliance militaire avec les USA | Totalement souverain |
RDC | République souveraine, membre de l’ONU | Totalement souveraine |
Aucune de ces situations ne s’applique à la RDC. Le pays ne dépend ni politiquement ni militairement des États-Unis de façon comparable.
3. Le droit international et la souveraineté de la RDC
La souveraineté de la RDC est protégée par plusieurs instruments juridiques internationaux :
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- Charte des Nations Unies, art. 2(1) : « L’Organisation est fondée sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses Membres ».
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- Acte constitutif de l’Union Africaine, art. 4 : affirme l’intangibilité des frontières et le respect de la souveraineté des États membres.
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- Constitution de la RDC (2006), art. 1 : « La République Démocratique du Congo est, dans ses frontières du 30 juin 1960, un État de droit, indépendant, souverain, uni et indivisible. »
Aucun traité bilatéral ou multilatéral ne remet en question cette souveraineté.
4. Les relations USA–RDC : coopération, pas domination
Il est vrai que les États-Unis ont renforcé leur coopération avec la RDC, en particulier sur les questions :
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- de sécurité dans l’Est du pays,
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- de lutte contre les groupes armés (ADF, AFC/M23),
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- de protection des minerais stratégiques (comme le cobalt ou le lithium et autres),
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- et de bonne gouvernance.
Mais cette coopération est encadrée par des accords bilatéraux classiques, notamment :
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- des aides au développement (via USAID),
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- des missions militaires non offensives (assistance, formation),
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- des projets économiques stratégiques (minerais, énergie).
Toutes fois, il est à signaler que la RDC est en cours des démarches pour un accord sur les minarais avec les USA. Aucune base militaire américaine n’est installée en RDC, contrairement à ce qui se passe en Corée du Sud ou au Japon.
5. Pourquoi une telle désinformation circule ?
Plusieurs raisons expliquent la viralité de ce type de contenu :
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- Défiance envers les autorités et les puissances étrangères,
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- Confusion entre coopération et soumission,
- Mauvaise interpretation des faits et non maitrise de la géopolitique,
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- Manque de sources fiables facilement accessibles,
- Une mauvaise volonté des partisants du parti au pouvoir à chercher à justifier le bilan désastreux du président actuel,
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- Et parfois, volonté politique de créer la peur ou la polémique.
L’affirmation selon laquelle la RDC est devenue un protectorat des États-Unis est juridiquement fausse, historiquement trompeuse et politiquement dangereuse.
La RDC est un État souverain, engagé dans des relations de coopération — pas de soumission — avec plusieurs puissances étrangères, dont les États-Unis. Il n’existe aucun traité ou document officiel établissant un protectorat ou une quelconque perte de souveraineté.
Sources fiables à consulter
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- Fact-ogl : https://fact-ogl.org
- Charte des Nations Unies : https://www.un.org/fr/about-us/un-charter
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- Constitution de la RDC : http://www.leganet.cd
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- Ambassade des États-Unis en RDC : https://cd.usembassy.gov/fr/
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- Actualite.cd, Radio Okapi, RFI Afrique